APPRENTISSAGE COOPERATIF
© Kashale Kalanga-Nadine
Selon Collectif Larousse (2005), l’apprentissage vient du mot «apprendre» qui veut dire acquérir des connaissances, une pratique, recevoir une information que l’on ignorait. Quant au mot «coopératif», il est dit de celui ou celle qui participe volontiers à une action commune. L’apprentissage coopératif est une approche interactive de l’organisation du travail en classe selon laquelle les élèves apprennent les uns des autres, de l’enseignante ou l’enseignant et du monde qui les entoure (Clark et coll, 1992 tiré de Chamberland, Lavoie et Marquis, 2006, p. 121). Nous vous invitons, à travers cet article, à porter une réflexion analytique sur la pertinence de l’apprentissage coopératif appliqué à la formation collégiale, comme stratégie éducative dans le développement des compétences chez les étudiants dans le domaine de la santé et des services sociaux.
Contexte actuel de soins de santé
Nous sommes tous sans ignorer que durant ces vingt dernières années, notre système de santé a connu plusieurs bouleversements, notamment les coupures budgétaires, la pénurie de personnel en général, celle du personnel infirmier en particulier, ainsi que les récents changements du gouvernement Charest (référence à la loi 90). Ces bouleversements ont apporté d’énormes perturbations au sein de notre système de santé, voire même au sein de notre société tout entière. Le personnel soignant de la fonction publique hospitalière est soumis à des nombreuses contraintes: pénurie de certaines catégories des soignants, absentéisme, augmentation de la charge de travail, conditions de travail pénibles et cela dans un environnement de travail sans cesse en mouvement. De nombreux soignants se trouvent au cours de leur carrière en situation de difficulté physique ou psychologique liée ou non à leurs exercices professionnels (ENSP, 2006). L’épuisement professionnel, la baisse de la qualité des soins, les conflits interpersonnels, et des maladies tant mentales que physiques chez les professionnels de santé ne sont que quelques éléments associés aux changements survenus dans notre système de santé et qui n’ont pas arrêté de faire la manchette de nos réseaux d’information.
L’apprentissage coopératif élément facilitateur
Les éléments causés par les changements survenus dans notre système de santé exigent cependant une réorganisation dans les façons de faire dans le domaine de la santé. Ainsi, la coopération et l’entraide au sein des professionnels de l’ensemble du réseau du système de santé apparaissent comme la voie à suivre dans la pratique des soins de santé de tous les jours au sein d’une équipe multidisciplinaire. D’ailleurs, l’organisation de notre système de santé est dorénavant composée d’équipes multidisciplinaires au sein desquelles chaque professionnel est appelé à prendre une place active. Ce personnel devra aussi y jouer un rôle de premier rang en vue de faciliter au patient l’accès aux soins de qualité, et ceci dans un délai raisonnablement acceptable.
Devant ce défi de taille, une formation collégiale basée sur la stratégie d’apprentissage coopératif est un élément facilitateur de la collaboration interprofessionnelle, car elle permet d’outiller la personne concernée en lui offrant des outils pouvant lui permettre de mobiliser ses ressources internes et externes. Cette approche fait aussi partie des visions d’avenir du gouvernement canadien qui déclare que: «l’avenir ultime de la formation interprofessionnelle pour une pratique en collaboration centrée sur le patient est de faciliter et d’appuyer la réalisation d’une stratégie sur les diverses facettes de la formation interprofessionnelle à la pratique en collaboration centrée sur le patient à travers tous les secteurs de la santé au Canada»(Santé Canada, 2003). La pratique de soins de santé dans une optique de collaboration implique un esprit d’équipe chez des personnes ayant les mêmes objectifs, mêmes buts et une implication personnelle réelle. Selon Arcand (1998), l’apprentissage coopératif a pour objet d’améliorer la réussite des élèves, en misant sur la qualité des relations interpersonnelles lors des activités proposées(…) Les interactions sociales que permet l’apprentissage coopératif permet incitent à verbaliser et à reformuler leurs idées. La création d’un contexte favorable à la discussion des connaissances au sein d’un groupe de coopération, améliore la qualité de l’apprentissage en soutenant le transfert des connaissances.
Une façon de voir l’avenir
Apprendre dans une vision de coopération laisse sous entendre que les personnes qui forment une équipe apprennent à trouver des solutions issues d’un consensus de tous les membres de l’équipe. C’est pourquoi, l’apprentissage coopératif contribue solidement à l’éducation de la citoyenneté, car il fait appel aux qualités humaines comme le respect de l’autre, l’honnêteté, l’entraide…tout en facilitant l’interaction entre les personnes. «L’apprentissage coopératif, c’est apprendre à coopérer. C’est une approche interactive et structurée qui met l’emphase sur le travail d’équipe où les apprenants des capacités et des talents différents joignent leurs efforts pour atteindre un même but. C’est une approche basée sur l’acquisition d’habiletés sociales» (Auteur inconnu 2006). L’apprentissage coopératif est une force en soi car il permet d’unifier les forces des membres d’une équipe pour ainsi minimiser leurs faiblesses individuelles.
Place des Techniques de l’Information et de la Communication (TIC) dans l’apprentissage coopératif
Étant donné la pertinence du travail basé sur la collaboration chez les professionnels du réseau du système de santé et des services sociaux, l’implantation de l’apprentissage coopératif dans le processus d’enseignement n’échappe pas aux pressions que le développement technologique et la mondialisation exercent sur l’acquisition et la capacité de gestion des informations à donner aux étudiants. Pour une gestion efficace et efficiente de ces informations disponibles sur divers supports technologiques, une méthode de connaissance de gestion de cette technologie de l’information s’avère nécessaire. Plusieurs études dans le domaine de l’éducation et de l’information présentent les TIC comme moyen de gérer cette technologie de l’information. Bérubé et Poellhuber (2005) soutiennent que : «…il s’agit surtout de reconnaître que les TIC offrent de multiples occasions d’apprentissage, et plus encore quand ce dernier est envisagé dans une perspective socio-constructive». Les mêmes auteurs ajoutent que: «les TIC sont des outils qui doivent maintenant faire partie de l’arsenal pédagogique de toute enseignante et tout enseignant».
Libre pensée
À la lumière de ce qui précède, nous pouvons dire que dans le contexte de soins de santé en perpétuel changement, une formation collégiale qui intègre dans ses stratégies éducatives l’apprentissage coopératif serait une façon visionnaire d’outiller les étudiants à pouvoir mieux gérer, du moins en partie, les difficultés auxquelles notre personnel de santé fait face durant ces dernières années. En effet, nul ne pourra sous estimer les effets bénéfiques d’un milieu de travail agrémenté par des relations de travail basées sur la collaboration. Lorsque les membres d’une équipe collaborent bien, ils entretiennent une relation de confiance. Cette relation de confiance renforce le sentiment d’appartenance et cela se manifeste par la motivation et la sensation de bien être tant physique que mental. Dans cet état de bien-être la personne est productive du fait qu’elle se plait dans son milieu de travail et se sent envahie par le sentiment d’autosatisfaction. N’a-t-on pas souvent entendu les phrases telles que : « j’aime mon travail; l’équipe est formidable; je peux compter sur les gens avec qui je travaille; on forme une grande famille… ». Ou encore : « j’ai lâché ce travail parce que mes collègues étaient insupportables, ils me rendaient fou… ». Ces phrases illustrent bien l’état d’esprit des membres d’une équipe qui collaborent bien et le sentiment d’appartenance y est renforcé. À l’opposé, un milieu de travail malsain où les gens ne collaborent pas ou très peu est susceptible de nuire à la santé de l’équipe. Du fait que chaque membre d’une équipe se sent concerné par les intérêts du groupe, il aura ainsi tendance à s’impliquer; ce qui aura un impact sur le rendement du groupe. Étant donné que chaque personne est unique, l’apport de chaque membre est sans doute une richesse pour le groupe. Chamberland, Lavoie et Marquis (2006) soutiennent que dans une situation d’apprentissage coopératif, on a faire à un groupe centré sur une tâche à réaliser où la compétition et l’individualisme n’ont pas leur place. Mis à part le fait que travailler en collaboration est l’expression d’un ensemble d’efforts conjugués, d’une association d’idées, d’une diversité des talents, d’une bonne gestion de temps, c’est surtout une façon d’être, une manière de vivre ensemble.
Bien que nous ayons tous réalisé les avantages de travailler en collaboration les uns avec les autres, cette façon de travailler présente également son lot des désavantages. L’apprentissage coopératif nécessite plus d’encadrement, cela prend plus de temps pour arriver à instaurer une relation de confiance entre les membres du groupe. C’est pour cela que l’intégration de l’apprentissage coopératif dans le processus de formation chez les professionnels de santé à venir est la meilleure manière de développer chez eux l’esprit coopératif comme un ‘’automatisme’’ dans leur expression du savoir, savoir faire et savoir être.
Les TIC utilisées dans un cadre purement pédagogique pourraient s’avérer l’outil bénéfique dans l’acquisition et l’échange du savoir chez les étudiants, dans le domaine de la santé et des services sociaux. L’apprentissage coopératif sous entend une coopération entre les membres d’une même équipe ou aussi, entre les différentes équipes. Les multimédias brisent nos frontières et rapprochent les individus. Les TIC facilitent la communication entre les individus en donnant accès aux informations pertinentes, favorisant ainsi le transfert et l’échange d’informations dans cette réalité actuelle du monde de la surinformation médiatique. La coopération est un comportement acquis et non inné; d’où l’importance de la développer à travers le un processus d’apprentissage coordonné.
Médiagraphie
Arcand., D. (1998). L’apprentissage coopératif. [Consulté le 21 mai 2006] à l’adresse http://www.tact.fse.ulaval.ca/fr/html/coop/2app_coo/cadre2.htm
Auteur inconnu. Apprentissage coopératif. [Consulté le 21 mai 2006] à l’adresse http://rtsq.qc.ca/multip/mo_inter/coop.pdf
Bérubé, B. et Poellhuber, B. (2005). Un référentiel de compétences technologiquement. Montréal : Collège de Rosemont.
Chamberland, G., Lavoie, L., Marquis, D. (2006). 20 formules pédagogiques. Montréal: Presses de l’Université de Montreal.
Collectif Larousse (2005). Dictionnaire Le Larousse de Poche. Paris : 1ere édition.
E.N.S.P (École nationale de santé publique). Rennes. FRA/com: [Consulté le 21 mai 2006] à l’adresse http://www.bdsp.tm.fr/base/scripts/ShowA.bs?bqRef=333538
Mottet, M. (2006). Notes de cours (PPA6015) : Méthode d’enseignement et TIC. Montréal: Presses de l’Université de Montréal.
Santé Canada, (2003). L’initiative sur la Formation Interprofessionnelle pour une Pratique en Collaboration Centrée sur le Patient (FIPCCP). [Consulté le 21 mai 2006] à l’adresse http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/hhr-rhs/strateg/interprof/call-appel_f.html